Qui étaient les fabriques De Laire ?
De Laire ? Aviez-vous déjà entendu ce nom ? A priori pas, à moins d’être un professionnel du parfum ou un passionné. Et pourtant, ce nom est un mythe chez les parfumeurs créateurs. Pourquoi et à quel titre ? En effet de nombreux sont les grands parfums qui contiennent des bases De Laire et ont fait la renommée de ces créations. Cette maison est à l’image d’un Lesage ou d’un Lemarié dans l’univers de la mode !… Je vous emmène sans plus tarder à la découverte de son histoire, et de son savoir-faire.
Les bases De Laire ?
Qu’est-ce qu’une base ?
Même si les Fabriques De Laire sont surtout connues pour leurs bases, je tiens juste à préciser que la maison a été l’un des spécialistes de matières premières de synthèse, de pré-parfums, voire même de la création de parfums clefs en main.
En effet, ce terme de base, peut revêtir plusieurs significations – à savoir un accord original contenant « un captif » ou un mélange de matières premières qui sert à simplifier une formule.
Or, il est important de savoir que De Laire n’était pas le seul dans la parfumerie à réaliser des bases. Mais au final, sans les bases, pas d’Origan, de Nuit de Noël, ni d’Iris Gris, de Knize Ten de L’Heure Blue de Guerlain…..
Les bases plus connues ?
- Bouvardia (Après L’Ondée de Guerlain)
- Prunol (Femme de Rochas)
- Mousse de saxe (présente dans Nuit de Noël de Caron et Habanita mais aussi L’Heure Bleue et Mitsouko de Guerlain)
- Ambre 83 (Bois des Iles de Chanel
Les molécules De Laire incontournables, et toujours utilisées
Parmi les différentes molécules De Laire, toujours utilisées aujourd’hui et produites par eux, on peut citer :
- L’héliotrope (1869), une odeur puissante d’héliotrope
- La coumarine (1868), une odeur de fève tonka
- L’aldéhyde anisique (1887), une odeur d’aubépine
- L’aldéhyde phénylacétique, une odeur de jacinthe
- Le terpinéol (1890), une odeur de lilas
- Le musc Baur (1888/1891), une odeur animale reprenant la puissance et l’animalité du musc naturel
Quels ont été leurs grands parfumeurs ?
On peut en citer surtout trois, soit Edmond Roudnitska, Henri Robert et Guy Robert.
- Edmond Roudnitska
Edmond Roudnitska va participer à la création de nombreuses bases. D’ailleurs, cet art initié par Marie-Thérèse De Laire, la veuve d’Edgar De Laire, lui permettra d’envisager une formulation plus directe. C’est ainsi qu’il créera It’s You d’Elisabeth Arden en 1938, le célèbre Femme de Rochas (1944) avec la base prunol.
- Henry Robert
- Guy Robert, neveu d’Henri Robert, travaillera chez De Laire. On lui doit Madame de Rochas
De Laire, une saga familiale
L’histoire des fabriques De Laire est celle d’une famille où les personnages principaux seront Georges, Edgar, Marie-Thérère, sa veuve, puis Jean, François et Robert. C’est donc dans un esprit profondément européen, les Fabriques seront implantées à Paris mais aussi à Londres et Berlin. En réalité, le génie de Georges, chimiste spécialiste de colorants, va être de breveter un certain nombre de “corps” avec A.W Hoffmann, un chimiste allemand, en charge de l’unité de chimie, de l’université de Londres.
Georges De Laire
Puis, quelques années plus tard, Georges découvrira avec Ferdinand Tiemann, le beau frère d’Hoffmann, et Haarmann un autre chimiste, la fameuse vanilline. Ce sera donc en 1876 que les Fabrique De Laire, lanceront la production. De ce succès, nait la première maison de corps aromatiques de synthèse.
Georges incitera son neveu Edgar à le rejoindre. Ce dernier saura s’entourer de chercheurs comme le professeur Moureau (octane et heptane carbonate de méthyle, une note verte violette et irisée), le professeur Blanc (alcool phenyl éthylique, une note de rose absolue) sans oublier Ferdinand Tiemann (ionone, une note violette et Haarmann (procédé de la vanilline). Tout le succès de cette entreprise repose sur l’étroite collaboration entre chercheurs et les fabriques De Laire, qui produiront et commercialiseront, le fruit de leur recherche.
Edgar De Laire
Après la guerre, Jean et François, les deux fils d’Edgar poursuivront l’histoire familiale. Enfin, les deux fils de François, Robert et Antoine prendront la relève en développant De Laire. C’est ainsi qu’Antoine se lancera dans la composition et la création de parfums aux Etats-Unis ; pendant que Robert développera la société familiale en France, pour devenir un fournisseur important dans l’industrie pharmaceutique.
C’est en 1987 que De Laire sera vendu à Florasynth, puis à Haarman & Reimer qui fusionnera avec Dragocco et aujourd’hui la société Symrise depuis 2003.
Il est à noter que Symrise vend et produit encore les bases mythiques De Laire telles l’Ambre 83, le Bouvardia, le Miel Blanc, le Prunol…. C’est en 2010, que la société décide de lancer de nouvelles bases.
133 ans après, De Laire figure toujours sur les claviers des parfumeurs ! Je vous présente dans un prochain article les nouvelles bases De Laire, présentées par Symrise.
Si vous avez des témoignages, des anecdotes ou des souvenirs, n’hésitez pas à me contacter via le formulaire du site et je serai ravie de les rajouter à l’article.
Je tiens à remercier Pascal Sillon, Parfumeur Senior chez Symrise pour le temps qu’il m’a accordé pour rédiger cet article
Super Bettina ton article De Laire
Merci
Guillaume Flavigny
Merci, Bettina, pour ces
articles! Je suis toujours à la recherche d’une réédition ou d’une réinterprétation de “l’Eau de Verveine de DAna” et quand vous présentez un chercheur-collectionneur-créateur-amoureux de parfum, j’espère chaque fois déceler entre vos lignes une piste vers cette senteur…
Je dispose d’une photo de groupe des employés de la fabrique de Calais vers 1948. Si cela vous intéresse ? Ma mère y été la seule femme ingénieure.
Mon père Henri Estève ingénieur chimiste aux Fabriques de Laire en a été directeur scientifique à la suite de Mr Delange jusqu’à son décès en 1963. S’il vous est possible de me l’envoyer cela m’intéresserait. Avec mes remerciements
M.Esteve