Serge Mansau, l’homme libre
Quelle grande maison de parfum n’a pas au moins un flacon dessiné par Serge Mansau dans ses tiroirs…. A mon avis, elles en ont toutes un. Aujourd’hui, l’homme, l’artiste, le sculpteur à la créativité inépuisable, vient de nous quitter. Désormais, la parfumerie est orpheline d’un créateur de génie, d’un homme libre… Je vous suggère de me suivre pour mieux découvrir la personnalité complexe et pas toujours bien comprise de cet homme au 250 flacons de parfum, et ses sculptures.
Juste quelques mots avant de partir à la rencontre de cet homme passionnant et passionné. Grâce à Dominique Camilli, un ami de la famille Dominique Camilli, j’ai rencontré pour la première fois, Serge Mansau, dans son atelier de la rue Ybry à Neuilly-sur-Seine. Eblouie, je le fus, par toutes les fabuleuses histoires de ses nombreux flacons, exposés sur des colonnes de l’atelier. Quelque temps plus tard, sa fille expliquait lors d’une formation de parfum, la naissance du flacon de Claude Montana. C’est passionné d’équitation que Serge imagina une encolure de cheval qu’il a ensuite torsadée. C’est aussi à cheval qu’il a enlevé Estelle, son épouse, il y a 46 ans. Quel chevalier ! Enfin, je l’ai interviewé à Boulogne, toute jeune journaliste. Je fus très intimidée devant sa prestance et son savoir.
Serge Mansau, un homme libre
Serge Mansau est un homme libre, tant dans sa conception que dans son style. D’ailleurs, il se disait “versastyle” ! ne voulant surtout pas, avoir un style. En un mot, c’était un artiste. Un artiste aux convictions fortes, ayant le courage de ses idées….jusqu’à même refuser une commande de flacon, dès lors, qu’il ne s’estimait pas être l’homme de la situation.
En effet, Dominique Daviaud de chez Lalique reconnaissait son immense talent, et savait pertinemment, qu’il n’accepterait pas de modifier son oeuvre d’un iota. Une réaction normale et propre à tout artiste ! A t-on demander à Picasso de changer une couleur de ses tableaux ?
Sa vision du flacon
Serge est entré dans le monde des flacons de parfum par la scénographie. Après des cours suivis chez le Mime Marceau, une rencontre avec Charle Dullin, Blaise Cendrars, il fera ses premiers pas, en tant que scénographe chez Charles Dullin, puis comme décorateur chez Helena Rubinstein. C’est dans la même maison, qu’il réalisera son premier flacon Skin Dew, un flacon iconique.
Sa passion du théâtre lui permettra de devenir l’Ambassadeur de l’indicible. Pour lui, le parfum est un texte avec lequel on essaie de jouer, alors que le flacon est l’acteur. C’est ainsi qu’il devient l’acteur principal de la marque et du jus.
Mille idées à la minute, il puise son inspiration aux sources même de la nature, en recueillant sur le verre, soit les nervures d’une feuille, soit le volume d’un insecte, soit l’aspect poli d’un galet ou d’un coquillage. “Il était bluffant par ses connaissances du verre jusque dans les moindres détails. De plus, les plans de ses flacons étaient toujours du domaine du faisable, tout en nous repoussant dans nos limites techniques. Au final, il aimait venir à l’usine, où il était très apprécié des techniciens, qu’il poussait à faire un pas technique de plus.” me raconte Catherine Descourtieux, à l’époque chez Saint Gobain Desjonquères.
Ses rencontres….
Insatiable, il se nourrissait de pensées tous les jours, qu’il inscrivait sur son cahier. Doté d’une qualité humaine exceptionnelle, il aimait s’entourer d’amis fidèles. Un véritable cercle de fans, tous unanimes, quand à son humour décapant, et son amour pour les mots, comme le souligne Anne-Caroline Prazan. Elle ajoutera, “Parmi les gens du marketing, il avait rapidement saisi que je le comprenais. C’est ainsi que nous entretenions une relation de confiance et de respect. Il était même devenu mon père spirituel.” Puis avec une certaine émotion, elle réalise qu’elle a un peu de Serge dans son bureau avec notamment une montre en papier qu’il lui avait confectionnée.
Un autre de ses grands amis, Jacques Vignaud, auteur du livre “Sentir” et créateur de marques de parfum, sera marqué pour toujours, par son immense culture artistique. Il garde en mémoire, cette inoubliable visite guidée, à la fondation Maeght, qu’il connaissait mieux que quiconque. Pour lui, on ne rencontre un homme d’une telle envergure, qu’une fois dans sa vie ! Un sentiment que partage aussi Gilles Thévenin, Président des parfums Lubin, qui appréciait ses joutes intellectuelles et artistiques. En effet, Serge appréciait la compagnie de personnes aux parti-pris forts.
De son côté, Veronique Gautier se souvient “combien il était impressionnant de sensibilité, capable de traduire nos demandes avec une grande poésie et toujours capable de nous surprendre et nous enchanter. C’était un homme émouvant et fort à la fois.”
Et ses anecdotes de flacons
Quand on lui demandait, qu’elle était son flacon préféré, il répondait tous et en était fier, sans exception, sinon comme me le raconte Estelle, son épouse, “il ne les aurait pas vendus !. Or, ils étaient pour lui tous ses enfants, aux histoires fortes”. En effet, parmi ces 250 flacons réalisés, se nichent plus d’une anecdote savoureuse et intellectuelle.
Ainsi Pierre Broc, à l’époque Président des Parfums Kenzo, me raconte avec une certaine malice, sa visite avec Kenzo Tagada à l’atelier de Serge. “A cet égard, Kenzo repéra au milieu d’un capharnaüm indescriptible un galet. Instantanément, Serge sortit un chewing-gum de sa bouche, qu’il plaqua sur le galet, pour planter ensuite des fleurs en plastique. Le flacon de “Kenzo, ça sent beau” était né !…” Et Pierre Broc poursuit “Une fois de retour, Kenzo me dit, c’est vachement facile de faire un parfum !….” et Pierre d’ajouter “Il y a de temps en temps des miracles.” Pour lui, il y eut beaucoup de miracles avec Serge !
“Sous ses dehors de prestance imposante par sa taille et sa chevelure blanche, Serge pouvait apparaître comme difficile à vivre, mais avait, enfoui au fond de lui, une grande générosité”, dit Estelle. Une qualité reconnue, aussi par Jacques Vignaud avec qui il a réalisé L’Insolent de Charles Jourdan. “Il m’a proposé un flacon aux formes coupantes et asymétriques, lové dans un tissu Fortuny. Puis, il a ajouté “Une femme est un diamant, si on ne sait pas la prendre, on se coupe !” Pour Serge, il y avait une façon de regarder le flacon, et surtout toute une gestuelle, pour le prendre…
En un mot, Serge laissera un vide abyssal. Mais nous espérons tous que ce passeur d’imaginaire, a pour seule limite, le Paradis. En effet, Nicolas Goulier, émet aujourd’hui une demande spéciale !… « Et si vous encapsuliez les parfums des Cieux ? Respect » Nous l’espérons tous !
toutes les mémoires, mémoires palpables par le sensation des flacons dans ta main. ‘l’insolence’, cette années au-delá. le flacon de kenzo j’ai toujours trouver très beau. un flacon pur
d’été. (les parfums en réverberation avec leur enrichement par
cette flacons exceptionelles.) trop un presonne disparû (comme
Karl) et qui ne semblait pas d’être en replacement pour quel’que temps, probablement jamais….) ah, la nostalgie indispensable des
personnes nommées par les parfums légendaires……aad [pays-bas]