La vision du muguet par Thierry Wasser
Depuis plus de 112 ans, la maison Guerlain fête le muguet ? Thierry Wasser, le parfumeur maison, s’y est penché en 2016. Alors, quel est sa vision du muguet ? Je vous livre ma conversation avec lui. C’est une autre façon de mieux connaître Thierry Wasser.
La vision du muguet par Thierry Wasser
On sait que le muguet est une fleur muette. Quels sont les ingrédients incontournables ?
Thierry Wasser : L’hydroxycitronellal est sans aucun doute un élément clé. Depuis, des Maisons de composition se sont penchées sur la question. En effet, aujourd’hui, il existe d’autres variantes, telles Lilyflore® chez Firmenich ou Lilybelle® chez Symrise.
Le muguet est apprécié depuis des siècles et ce bien avant la synthèse. Qu’est ce que la chimie à apporter pour recréer son odeur ?
Thierry Wasser : Effectivement, la synthèse a permis de recréer l’odeur du muguet. D’ailleurs, le muguet est l’un des exercices proposés dans les écoles de parfumerie. Ceci étant, il est important de mentionner d’autres grands parfums de muguet, en dehors de Guerlain. Il s’agit du Lily of the Valley de Floris (1847), le Muguet des bois de Francois Coty (1941) et le Diorissimo (1956) d’Edmond Roudnitska pour Dior. Or, la fleur apparaît aussi en soliflore chez de nombreuses de marques de niche, telles que Penhaligon’s, Annick Goutal, Louis Vuitton…
Depuis 1908, la Maison Guerlain a des parfums Muguet. Quelle est votre vision des différents muguet de la Maison Guerlain ?
Thierry Wasser : Un parfum portant le nom de Muguet se doit de sentir la fleur. De fait, il s’agit d’une réalité photographique tout comme un travail Photoshop, façon impressionniste. Or, le Muguet de Jean-Paul Guerlain répond complètement à cette démarche photographique de la composition.
Pouvez vous nous parler plus en détails des Muguet de Jacques, Jean-Paul et du vôtre ?
Thierry Wasser : Chaque Parfumeur a ces matières fétiches.
En revanche, Jacques Guerlain a choisi des fleurs comme la rose, le jasmin, et l’iris. Des notes, qui d’ailleurs donnent un léger effet de Guerlinade à ce Muguet. Mais à aucun moment, la présence de l’iris n’a vraiment donné un effet poudré.
De son côté, Jean-Paul voulait exprimer la célébration du muguet avec une encre nouvelle. C’est pour cela qu’Il a utilisé d’autres ingrédients, à sa disposition en 1998, la date de création du parfum.
Et en ce qui concerne mon muguet, je me suis inspiré de la formule de Jacques Guerlain. D’ailleurs, le Muguet d’aujourd’hui est totalement dans la filiation de celui de 1908. En effet, je lui emprunte le côté vert que j’ai exagéré avec les notes vertes. J’ai dirais même que mon Muguet un peu plus végétal et plus vert.
En conséquences, ces 3 Muguets Guerlain, constituent 3 photos réalisées par trois générations de parfumeurs.
Le muguet est surtout connu sous forme de soliflore. Cependant, il est aussi présent dans nombre de compositions. Comment l’utilisez-vous ?
Thierry Wasser : Personnellement j’utilise cette note muguet, par fragments, notamment pour son côté ingénu. Cependant, il apporte un souffle aux compositions. En effet, dans Idylle, son cœur fleuri est composé de muguets, de roses bulgares, de jasmins et de freesias est mis en valeur grâce à des profondeurs intenses de patchouli et muscs blancs. Sinon, on retrouve aussi du muguet dans Herba Fresca, une Aqua Allegoria.
Le Muguet du bonheur de Caron, même pas cité ?