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Posted by on Fév 16, 2015 in Sentir/Goûter | 0 comments

Discussions à huit clos – Parfumeurs et Cuisiniers (suite)

Discussions à huit clos – Parfumeurs et Cuisiniers (suite)

La discussion à huit clos se poursuit…. Parfumeurs et cuisiniers continuent d’échanger sur le sujet de la création en parfum et de la création d’un plat….

Quel rôle joue les épices et les aromates ?

Les parfumeurs utilisent les épices pour souligner les accords fleuris de leurs créations. A ce jour, les épices soufflent des impressions glaciales ou chaudes. Christine Nagel a utilisé le poivre, l’élémi et la cardamome comme un laser glacial dans Histoire d’Eau de Mauboussin. Sinon, ces dernières peuvent donner un caractère fusant en tête, très sensuel. Marco Polo de Muelhens, réalisé par Christophe Raynaud, parfumeur chez Créations Aromatiques, l’illustre parfaitement avec un accord muscade blanche-cardamome. Les épices ont toujours le vent en poupe.

Quand la cuisine rejoint les parfums

Au vue des correspondances entre les odeurs et les saveurs, des échanges d’idées sont peut être envisageables entre les deux mondes.

Que répondent messieurs les parfumeurs et messieurs les chefs cuisiniers ?

Il n’est pas surprenant d’apprendre qu’ils se côtoient et s’apprécient. Lors d’un lancement, Christine Nagel a rencontré Alain Passard, ce qui leur a permis de découvrir de nombreuses similitudes, dans leurs métiers respectifs. Si on écoute Christine Nagel, cette rencontre l’a incitée à sortir des conventions établies en parfumerie. « J’ai plus d’audace et d’insolence dans mes créations » ajoute t-elle. C’est ainsi que lors d’un déjeuner, Alain Passard réalise des coquilles St Jacques avec de l’orange et du safran. Aussitôt, ce plat inspire à Christine un accord hespéridés, épices et notes marines. En retour, Alain Passard a conçu un canard au cèdre après avoir senti un accord cèdre animal de Christine !

Eau de campagne de Sisley

Eau de campagne de Sisley

Maurice Maurin créa avec son fils un menu parfumé dans son restaurant Macis & Muscade (fermé aujourd’hui). Ce pouvait être une entrée de chèvre aux feuilles de tétragone parfumée au ciste, mis au point d’après le célèbre accord chypre (bergamote, mousse de chêne, ciste labdanum). Un turbot au benjoin figurait à la carte, la note vanille du benjoin se liant harmonieusement avec la rondeur et la souplesse du turbot.

C’est en humant et en froissant les feuilles des tomates de son potager à Grasse que Jean-Claude Ellena a imaginé l’Eau de Campagne de Sisley. Même chose pour le thé de Bulgari. Enfin, Céline Ellena m’a évoqué un risotto aux truffes à la fois doux et puissant qui lui a suggéré un accord animal, boisé tel le cèdre avec du patchouli et une note cuir.

Innovation à tout prix ?

D’après Guy Savoy, « la cuisine est l’art de transformer des produits chargés d’histoires ». La nouvelle cuisine est une chance pour la cuisine, continue t-il. Et Pierre Gagnaire reconnaît la sincérité et l’intégrité de la cuisine des chefs comme Chapel et Guérard. La nouvelle cuisine a fait renaître le goût essentiel du produit par la mise en valeur de sa texture et de toutes les saveurs. A cet effet,

l’innovation à tout va n’est pas une néccessité. Alain Passard ne se contente que de quelques nouvelles Ispahanrecettes par an et reste fidèle aussi à ses classiques comme ses fameuses tomates aux douze saveurs. Sa cuisine est le lieu de toutes les alchimies. Il joue sur les textures chaud/froid et les saveurs. A titre d’exemple, un œuf chaud/froid ciboulette avec un vinaigre de zerès et un sirop d’érable. Tous les sens se réveillent. Guy Savoy imagine ses plats selon ses envies. Qu’Il s’agisse d’huitres en nage glacée, d’une soupe d’artichaut à la truffe et parmesan ou d’oursins chauds aux crosnes ! De son côté, Pierre Gagnaire marche à l’instinct. Roger Vergé travaillait toutes ses recettes dans l’harmonie et la justesse. Il a toujours été un défenseur de la qualité et de la simplicité. A son menu, ce pouvait être « un poupeton provençal », une fleur de courgette farcie à la truffe ou « un filet Maturini », une viande passée au poivre avec une sauce d’armagnac. Enfin, Pierre Hermé a mis au point des accords qui sortent de l’ordinaire tels une note rose, litchi et framboise ou un macaron noisette grillée et truffe blanche.

Les idées fourmillent du côté des marques niches comme l’Artisan Parfumeur, Comme des garçons, Annick Goutal, Frédérique Malle et les parfums de Serge Lutens, disponibles aux Salons du Palais Royal. Ces dernières osent partir sur des chemins peu usités. Leurs rêves et leurs voyages sont variés. Les parfums Serge Lutens effacent toute réalité, dispersant des atmosphères chaudes et sensuelles venant tout droit du Maroc. De son côté, Marie Dumont, ex présidente de l’Artisan Parfumeur fut la première à ouvrir de nouvelles voies de parfumage comme les gris gris, les cerfs-volants ou les courants d’air parfumés. De son côté, Frédéric Malle a innové en mettant en avant les auteurs des parfums.

L’Odeur, temple des souvenirs

Eau d'Issey - Parfumeurs et cuisiniersQue l’on sente un parfum ou que l’on goûte un mets, des souvenirs et des images nous reviennent sans cesse en mémoire. Tous les chefs ont les odeurs des plats de leur enfance, qui se dispersaient dans la maison, en mémoire. Certains comme Guy Savoy se remémore l’odeur du poulet ou des tartes, Roger Vergé parle des plats que sa tante Célestine lui mijotait et Alain Passard voit défiler les parfums épicés et herbacés qui flottaient dans la cuisine de sa grand-mère Louise. Ce sont pour eux de vrais réserves d’émotion. Mais portent t-ils des parfums ? Silence pour certains et enthousiasme pour d’autres. Pierre Gagnaire cite L’Eau d’Issey pour Homme et l’Eau de Cologne de Thierry Mugler alors que Guy Savoy porte Egoïste de Chanel.

Que dire des parfumeurs…se mettent-il devant les fourneaux. Dans l’ensemble oui. Ils racontent avec joie leur plaisir à goûter, à inventer et à surtout à ne pas suivre les livres. Si on les écoute, Marc Buxton aime le four et les plats qui mijotent, Christine Nagel, la cuisine indienne et italienne pour sa richesse et ses saveurs. Rien d’étonnant, cette dernière compose facilement des orientaux. Jean-Claude Ellena s’amuse avec le rissotto, un plat où l’on peut tout imaginer et où tout est possible, souligne t-il. Céline Ellena se délecte avec la daube dont les arômes se diffusent progressivement dans sa cuisine.

Les parfumeurs et les cuisiniers convoquent quotidiennement leur sens qu’ils gardent en éveil. Leurs créations déclenchent de vrais moments de bonheur et d’esthétisme. Est ce à dire que la cuisine est un art au même titre que la parfumerie ? Tout un autre débat.

Parfumerie d’auteur, cuisine d’auteur ?

En passant, un parfum d'Olivia Giacobetti

En passant, un parfum d’Olivia Giacobetti

On parle de cuisine d’auteur mais pas encore de parfumerie d’auteur, exception faite pour les parfums « Des Editons Frédérique Malle ». Ce dernier a été le premier à mettre en avant les créateurs-parfumeurs pour leurs œuvres – « D’Angélique sous la pluie » de Jean-Claude Ellena ou encore de « En passant » d’Olivia Giacobetti. En revanche, la cuisine d’auteur existe puisque l’on parle d’Alain Passard à l’Arpège, du restaurant Guy Savoy, du restaurant Pierre Gagnaire, de la pâtisserie Pierre Hermé.

Le respect des odeurs et des saveurs

Existe t-il une méthode d’extraction d’ingrédients parfumés qui respectent leur odeur et une méthode de cuisson qui préserve la saveur de l’aliment ? En parfumerie, les parfumeurs ont à leur disposition la méthode d’extraction au CO2, mise au point par la société grassoise CAL Chauvet du groupe Danisco. Cette méthode plus constante en température, permet de garder à l’identique, l’odeur que celle sent l’ingrédient dans la nature. La baie rose, extraite au CO2 est un élément clé dans Pleasures d’Estée Lauder.

En cuisine, Pierre Hermé parle de cuisson sous vide pour les confitures qui préserve le goût et la couleur du fruit. Guy Savoy choisit le type de cuisson le plus adéquat au produit. D’après lui, à chaque cuisson sa ou ses saveurs. En revanche, Alain Passard est un fervent défenseur de la cuisson à la casserole avec son couvercle.

Carnet d’adresses :

Boutiques Pierre Hermé : 72 rue Bonaparte 75006 et Bd Malesherbes 75008 Site internet : www.pierreherme.com

L’Arpège : 84 rue de Varennes 75007 Paris Tel : 01 47 05 09 06 Site internet : www.alainpassard.com

Restaurant Guy Savoy : 18 rue Troyon 75017 Paris Tel : 01 43 80 40 61 Site internet : www.guysavoy.com

Restaurant Pierre Gagnaire : 6 rue Balzac 75008 Paris Tel : 01 40 62 92 12 Site internet : www.pierre-gagnaire.com

Le Moulin de Mougins ou l’Amandier à Mougins : Tel : 04 93 75 78 24 Site internet : moulin-mougins.com

Dites moi quel est votre parfumeur et votre chef  préféré en me laissant un commentaire

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