Les émotions au coeur des odeurs
Qui n’a pas fait l’expérience de ressentir une odeur, qui brusquement réveille un souvenir, un événement, une ambiance particuière ou une personne. Ce souvenir sucitera inévitablement une émotion. Que faire de ces émotions ? Y a-t-il quelque chose à comprendre ?
Le monde des odeurs n’a jamais laissé qui que ce soit indifférent. Il a tour à tour intrigué, fasciné, dégoûté. On peut donc dire qu’il déclenche et réveille la plupart du temps des émotions (joie, peur, tristesse). Etonnant, quand on sait qu’une odeur est invisible. Elle est évanescente et ne peut être décrite qu’en l’associant à un autre support. Sa description demeure, sans aucun doute subjective.
Le triangle infernal : odeurs, émotions, mémoire
Dès lors que nous humons une odeur, nos réactions affectives sont immédiatement traitées par le cerveau, plus exactement le cerveau limbique, aussi appelé « le rhinencéphal » (ce qui veut dire le nez dans le cerveau). C’est donc à lui, que l’on doit, le décodage de l’information transmise par l’odorat.
Mais, ce dernier est aussi tourné vers notre monde intérieur c’est-à-dire qu’il gère les émotions, la mémorisation, la motivation. Par conséquent, il analyse l’information olfactive reçue, qu’il jugera agréable ou non. Contrairement au cerveau primitif, le cerveau limbique est binaire.
Les influx nerveux provoqués par les odeurs, sont en lien direct avec notre vie émotionnelle et stimulent aussi les centres de l’attention, de la mémoire et du raisonnemment. Ces voies sont physiologiquement séparées. A cet effet, Patty Canac cite dans son livre « Etes-vous au Parfum ? l’exemple d’une femme qui ignore dans un premier temps pourquoi elle pleure, en sentant l’odeur des animaux dans une maison marocaine qu’elle visite.
Mais, après un moment, ses trajets nerveux finissent par se rejoindre pour lui donner la qualité du souvenir et le nom de l’odeur. Et là, pour cette femme, c’est le souvenir de son enfance paysanne, qui lui revient par cette odeur. D’ailleurs, une fois ce souvenir retrouvé, elle pourra visiter la maison sereinement.
Les émotions réveillée par la fameuse Madeleine de Proust ?
Si Baudelaire, Zola, Flaubert, Chateaubriand, Balzac montrent dans leur œuvre, une sensibilité au monde olfactive, Proust se penche sur l’odeur du temps retrouvé. Que ce soit dans « Du côté de chez Swann », « A la recherche du temps perdu », « A l’ombre des jeunes filles en fleurs », le monde des odeurs est omniprésent. L’odorat lui permet d’éprouver les liens intimes entre les êtres et les objets, la nature, le monde intérieur et extérieur.
Et, « la célèbre histoire de la madeleine » met en exergue les liens entre une odeur, un goût, l’émotion et la mémoire. Ce que Proust nous dit dans A la Recherche du temps perdu « Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans notion de la cause (…) D’où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu’elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu’elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature » En goûtant une deuxième fois, son trouble émotionnel fût plus intense. « Il est clair que la vérité que je cherche, n’est pas en lui (le thé), mais en moi. (…) Je pose la tasse et je me tourne vers mon esprit. C’est à lui de trouver la vérité ».
Ce ne sera que quelques instants plus tard, le trajet nerveux de l’odeur ayant rencontré les émotions que le souvenir lui apparut. « Ce goût c’était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (…) ma tante Léonie m’offrait après l’avoir trempé dans son infusion de thé. Sans le savoir, Proust venait de décrire le trajet neurologique des odeurs… Sacré odeur !…
Ces souvenirs, liés aux odeurs nous rappellent de bons ou mauvais moments du passé. Quoi qu’il arrive, ce sont des prises de conscience, des messages qu’il est intéressant d’écouter, pour avancer sur son chemin. S’ils sont négatifs, ils s’invitent pour que l’on prenne le temps de les regarder, de les comprendre puis de passer à autre chose, une fois l’émotion assimilée.
Les odeurs nous influencent
Tout au long de la journée, nous ne cessons de rencontrer des odeurs que nous respirons. Ces dernières suscitent en nous et sans même que nous en soyons conscient, une émotion agréable ou pas. Plus étonnant, encore elles modifient notre humeur et nos comportements.
J’aime les odeurs de muguet, de lilas, de jacinthe synonymes de joie et gaieté. Lors des premiers rayons de soleil du printemps, ces fleurs nous communiquent des odeurs pétillantes. Les odeurs peuvent aussi avoir une action physiologique c’est-à-dire soulager une douleur, favoriser le sommeil….
Sentir une odeur de lavande calme ou une odeur d’eucalyptus, dégage la respiration et parle de grands espaces. Cette dernière, est une odeur que j’apprécie, tout particulièrement. Elle a aussi indirectement un effet calmant puisqu’elle donne cette impression d’oxygène qui influe sur notre respiration.
L’olfactothérapie : mieux se connaître, mieux s’aimer
Cette méthode mise au point par Gille Fournil en 1992, offre à chaque être humain, la fabuleuse opportunité, au travers des odeurs, de mieux se connaître, mieux s’aimer, enfin, Vivre pleinement sa vie. Complémentaire d’une thérapie plus classique, l’olfactothérapie donne la possibilité de metttre en veilleuse « son mental »… Pas mal !… surtout quand ce dernier est encombrant et un peu trop, omniprésent.
Elle tire parti des fabuleux pouvoirs des odeurs en ramenant à notre conscience des souvenirs enfouis, tout en nous donnant la chance d’éveiller en nous des changements psycho-corporels.
De fait, elle utilise l’émotion qu’a provoqué le souvenir heureux ou pas avant que n’intervienne la verbalisation. C’est ainsi que le mental est pris de cours.
Mon expérience des odeurs et des émotions
Plus concrètement, lors de ma séance d’olfactothérapie, dans une position allongée, après quelques respirations pour me détendre, j’ai relevé parmi 7 odeurs ; une odeur aimée et une odeur non aimée, sans essayer à aucun moment de déceler le nom de l’huile essentielle. Je ne m’attarderai que sur l’odeur non aimée.
L’odeur non aimée était sombre, poussiéreuse, voir humide. Guidée par les questions de l’olfactothérapeute, je voyais une cave, puis un tiroir de commode. Pas très à l’aise, l’odeur m’enveloppait le dos jusqu’aux lombaires tout me donnait mal à la tête. Je visualisais cette odeur jaune moutarde.
Puis subitement, je me suis vue, petite, dans la douche entourée de planches de bois, lieu où ma grand-mère m’enfermait quand je n’étais pas sage. Ce n’était pas de bons souvenirs. Quelques minutes plus tard, je me suis revue avec mes poupées, mon teckel que j’habillais et que je promenais dans le jardin. C’était en quelque sorte, mes refuges.
A la fin de cette session, l’olfactothérapeute m’a posé le flacon sur la poitrine et j’ai eu un moment désagréable. Puis j’ai senti que les vibrations de l’huile essentielle, étaient rentrée en résonance avec mon monde intérieur. Mon corps s’est apaisé et je me suis sentie mieux.
L’odeur était celle de l’encens. Cette dernière, selon Gilles Fournil, favorise la respiration calme, large et profonde et nous permet donc de prendre de la hauteur. Elle nous apprend aussi la patience. Mais, surtout il nous autorise à voir les choses autrement, en quittant des schémas restrictifs. C’est ainsi que notre stress diminue et nous pouvons aborder la vie avec confiance.
L’olfactothérapeute m’a proposé de respirer cette odeur tous les soirs avant de m’endormir afin que d’apprendre à intégrer et apprécier cette odeur. Ce que je fais actuellement. Je note dans un carnet, les sensations, que je perçois dans mon corps.
J’ai pu constater que cette odeur que je n’ai pas encore adoptée, me calme, nettoie de l’intérieur des nœuds, me fait lâcher et surtout me redonne un sommeil plus réparateur et serein.
J’avoue que cette première expérience m’a étonnée. J’ai beaucoup apprécié de débrancher le mental, commencer à être à l’écoute de mon corps et de voir le bien que cela m’avait fait. Ce n’est qu’une fois l’odeur aimée que l’on retourne voir l’olfactothérapeute, si on désire continuer sur ce chemin olfactif !
Se retrouver grâce à une odeur
Autre expérience très touchante que j’ai lu dans le livre de Patty Canac. Il s’agit d’un homme d’une cinquantaine d’années, victime de plusieurs accidents cérébraux qui ont endommagé sa mémoire. « Je lui tends un petit café olfactif, sans bien sûr lui indiquer dans quel produit, j’ai trempé la touche olfactive. Depuis son arrivée à l’hôpital, personne ne l’avait jamais vu sourire. Aussi, je demeure sidérée par l’éclat de rire qui anime son visage, à l’instant même, où il porte sous son nez, la touche imbibée d’odeur : du café, c’est du café !
J’adore ça ! du café moulu à l’ancienne, comme on tirait le tiroir du moulin et que l’odeur vous arrivait, en plein nez ! Et puis, le café, je connais bien. Je travaillais dans une entreprise qui importait du café ! J’allais en Colombie pour choisir les grains… J’ai voyagé et ai connu les principales plantations de la région. Cette odeur de café, là, c’est comme une odeur de vie.
Amnésique depuis des mois, cette odeur de café a fait resurgir en lui toute une époque de sa vie passée.
Que de voyages ne nous font pas faire le monde des odeurs ! Si l’émotion que suscite les odeurs est si intime, c’est sans aucun doute qu’elle nous touche dans notre monde intérieur. Si certaines œuvres s’écoutent, d’autres se regardent, les odeurs ont la particularité de se respirer, se regarder et s’écouter.
Des émotions pour quoi faire ? Le chemin des odeurs m’a permis de prendre conscience qu’il était important de prendre de la distance par rapport aux évènements et un peu plus de calme.
Si cet article vous a plu, n’hésitez pas à me poser des questions ou me faire part de vos expériences olfactives. Il participe à l’évènement interblogueurs « Des émotions pour quoi faire ? » organisé par Pierre du blog Pierre-Cocheteux.com
Chère bettina, merci pour cet article passionnant, plein de sensibilité et plein d’émotions… aurais-tu une adresse d’olfactothérapeute ?
Je te recommande Marie-Thérèse Petit sur Paris et tu retrouveras ces coordonnées sur le site http://www.olfactothérapie.com ou sur son site http://bleugentiane.net/naturopathie.html.
Super article, j’ai remarqué aussi que peu de temps avant de quitter ma compagne son odeur me dérangeait de plus en plus.
Je pense aussi que les odeurs sont des héritages lointains, il ne faut oublier que nous sommes à la base des animaux super évolués.
Et comme le chien les odeurs sont là pour nous informer.
Super article. De mon coté j’ai pu constater le rôle des odeurs lorsque mes sentiments pour ma compagne ce sont estompés.
Son odeur m’a alors dérangé alors que jusque là cela ne m’était jamais arrivé avec elle.
Je pense que c’est l’héritage de nos lointains ancêtres, pour qui l’odeur était une information cruciale.
J’aimerai en savoir plus un jour sur le pourquoi du comment.
Moi j’ai une question je ne sais pas si cela est en phase avec l’article.
Voilà… je suis sensible des odeurs, lorsque je sens une odeurs, surtout l’odeur d’une personne, que l’odeur soit artificielle ou non, c’est dingue ! Mon cerveau se met à imaginer comment vit la personne, mais tous se passe très vite, j’imagine très vite son hygiène de vie, si elle est sereine ou non, douce ou doux, ou agressif. En tout cas, cela m’arrive de temps en temps.
Mais je ne trouve pas d’explications à cela. Cela ne dérange pas, mais par curiosité je voulais savoir d’où ça vient.